📝Glaucome chez le chien - Feuille de sortie
- Charles Rochette
- 31 oct. 2023
- 7 min de lecture
Dernière mise à jour : 11 févr. 2024

Introduction:
Le glaucome chez le chien est une pathologie oculaire grave et multifacette, exigeant une intervention médicale prompte et spécialisée. Cette maladie, caractérisée par une augmentation de la pression intraoculaire, peut entraîner des dommages irréversibles au nerf optique et à la rétine, menaçant ainsi la vision de l'animal. Il est essentiel que les vétérinaires et les propriétaires d'animaux comprennent les nuances de cette affection, y compris ses causes, ses symptômes, et les options de traitement disponibles. Cette compréhension permet non seulement un diagnostic rapide et précis, mais aussi une gestion efficace de la maladie, avec pour objectif ultime de préserver la qualité de vie de l'animal et d'éviter la perte de vision
Étiologie:
Le glaucome est divisé en deux grandes catégories: primaire et secondaire. Le glaucome primaire est en général d'origine héréditaire et implique un dysfonctionnement du drainage de l'humeur aqueuse de l'œil. À l'inverse, le glaucome secondaire est le résultat de conditions préexistantes qui affectent le drainage de l'œil.
Glaucome primaire: Le glaucome primaire, souvent d'origine héréditaire, est caractérisé par un dysfonctionnement intrinsèque du système de drainage de l'humeur aqueuse, principalement au niveau des canaux de Schlemm de l'œil. Cette forme de glaucome est fréquemment observée comme étant bilatérale et est plus prévalente dans certaines races de chiens, ce qui indique une forte composante génétique. Les anomalies génétiques impliquées dans le glaucome primaire conduisent à une altération du mécanisme normal de drainage de l'humeur aqueuse, entraînant ainsi une augmentation progressive de la pression intraoculaire. Cette augmentation de pression, si elle n'est pas traitée, peut causer des dommages irréversibles au nerf optique et à la rétine, menant à une perte de vision. Il est crucial pour les vétérinaires et les propriétaires d'animaux de comprendre cette prédisposition génétique, car elle peut influencer à la fois le diagnostic et les décisions de gestion à long terme, notamment en ce qui concerne la surveillance et le traitement prophylactique des chiens à risque.
Glaucome secondaire: Le glaucome secondaire chez le chien résulte de diverses conditions pathologiques préexistantes qui affectent le drainage normal de l'humeur aqueuse ou la pression intraoculaire. Les causes les plus courantes de glaucome secondaire incluent les cataractes, les luxations du cristallin, les tumeurs oculaires, les uvéites et les traumatismes oculaires. Les cataractes, par exemple, peuvent obstruer le flux normal de l'humeur aqueuse, tandis que les luxations du cristallin perturbent l'anatomie interne de l'œil, entraînant des problèmes de drainage. Les tumeurs, qu'elles soient à l'intérieur de l'œil ou dans les tissus environnants, peuvent exercer une pression qui affecte la circulation de l'humeur aqueuse. Les uvéites, qui sont des inflammations de l'uvée, peuvent être déclenchées par des infections, des maladies auto-immunes ou des réactions à des traumatismes, et peuvent également contribuer à l'augmentation de la pression intraoculaire. Enfin, les traumatismes oculaires, qu'ils soient le résultat d'accidents ou de blessures, peuvent endommager les structures de drainage de l'œil.
Symptômes:
Le glaucome chez le chien se manifeste par une gamme de symptômes qui évoluent avec la progression de la maladie. Initialement, les signes visibles incluent une rougeur oculaire persistante et un œil qui peut apparaître gonflé ou agrandi, signe d'une augmentation de la pression intraoculaire. La pupille peut devenir anormalement dilatée et ne pas réagir correctement à la lumière, tandis que la cornée peut devenir trouble ou bleutée. Sur le plan comportemental, les chiens peuvent montrer des signes de douleur et d'inconfort, se frottant l'œil, devenant moins actifs, et montrant une anxiété accrue. Cette douleur peut également entraîner une perte d'appétit et une léthargie. À mesure que la condition s'aggrave, la vision du chien peut être affectée, se manifestant par une difficulté à naviguer dans leur environnement, une réaction retardée aux stimuli visuels, et une orientation altérée. Dans les cas avancés, une conjonctivite, une inflammation et une rougeur de la conjonctive peuvent survenir, accompagnées d'une réduction de l'activité et d'un comportement plus retiré. Ces symptômes, surtout lorsqu'ils apparaissent rapidement, nécessitent une consultation d'urgence avec un vétérinaire spécialisé en ophtalmologie.
Diagnostic:
Le diagnostic du glaucome canin commence par un historique médical complet et un examen physique général afin d'identifier les facteurs de risque potentiels ou les causes sous-jacentes possibles d'un glaucome secondaire. Ces informations peuvent inclure des antécédents de traumatismes oculaires, de maladies systémiques affectant l'œil, ou des indications de prédisposition génétique dans certaines races. Ensuite, la première étape de l'examen oculaire proprement dit débute par la mesure de la pression intraoculaire (PIO). Cette mesure est généralement réalisée à l'aide d'instruments spécialisés tels que le Tono-vet et peut être prise en établissement vétérinaire de pratique générale. Cette mesure est essentielle pour évaluer l'augmentation de la PIO et permettre le diagnostic de glaucome. Le vétérinaire traitant pourra ensuite effectuer un examen ophtalmoscopique du fond d'œil, indispensable pour détecter les signes de dommages rétiniens et autres altérations structurelles associées à l'augmentation de la PIO. Cette évaluation peut révéler des changements tels que la cupulisation du disque optique, un signe classique du glaucome avancé.
La gestion du glaucome s'effectuant en centre spécialisé auprès d'un ophtalmologiste vétérinaire, le reste des démarches diagnostiques se produira en centre de référence. Une technique clé dans le diagnostic du glaucome est la gonioscopie. Cette procédure permet l'examen de l'angle irido-cornéen pour identifier les anomalies de l'angle de drainage, particulièrement utile dans le diagnostic du glaucome primaire. Comparer cet angle avec celui de l'œil non affecté peut fournir des informations cruciales sur la nature et l'étendue de la maladie. Pour une évaluation plus poussée de la fonction rétinienne, en particulier dans les cas avancés de glaucome, un électrorétinogramme (ERG) peut être réalisé. Ce test permet d'évaluer la santé et la fonction de la rétine, un facteur important pour déterminer les perspectives de traitement et de préservation de la vision.
Traitement:
En pratique générale, le traitement initial du glaucome canin en situation d'urgence se concentre sur la réduction rapide de la pression intraoculaire (PIO) pour minimiser les dommages au nerf optique et à la rétine. Les médicaments topiques, tels que les bêta-bloquants (par exemple, le Timolol), les analogues des prostaglandines (comme le Latanoprost) et les inhibiteurs de l'anhydrase carbonique (par exemple, le Dorzolamide), sont fréquemment utilisés pour abaisser la PIO. Ces médicaments fonctionnent soit en diminuant la production d'humeur aqueuse, soit en facilitant son drainage hors de l'œil. En cas de glaucome aigu et de forte augmentation de la PIO, un traitement systémique peut être nécessaire. Les diurétiques osmotiques comme le mannitol sont administrés par voie intraveineuse pour réduire rapidement la PIO. Ce traitement peut être crucial pour éviter des dommages irréversibles à l'œil, mais il doit être effectué avec prudence, en tenant compte des conditions systémiques de l'animal.
Il est important de noter que ces traitements d'urgence ne sont que temporaires et doivent être suivis d'une évaluation approfondie par un ophtalmologiste vétérinaire. Le traitement à long terme du glaucome, en particulier dans sa forme primaire, peut nécessiter une approche multimodale incluant des médicaments, des modifications du mode de vie, et potentiellement des interventions chirurgicales. Les interventions chirurgicales, comme la cyclophotocoagulation transclérale au laser diode ou l'implantation de dispositifs de drainage (par exemple, l'implant de Ahmed), peuvent être envisagées pour gérer la PIO sur le long terme. Ces options chirurgicales sont généralement recommandées lorsque les traitements médicamenteux ne parviennent pas à contrôler efficacement la PIO. Dans les cas où le contrôle de la PIO est impossible ou lorsque l'œil est gravement endommagé et douloureux, des options plus radicales comme l'énucléation peuvent être considérées. Il est crucial de gérer la douleur de l'animal tout au long du processus, car le glaucome peut être extrêmement douloureux. Le suivi régulier avec un ophtalmologiste vétérinaire est essentiel pour surveiller la réponse au traitement, ajuster les médicaments si nécessaire, et prendre des décisions éclairées concernant les options de gestion à long terme. L'objectif est de préserver la qualité de vie de l'animal en maintenant sa vision aussi longtemps que possible et en contrôlant la douleur associée au glaucome.
Prévention:
La prévention du glaucome canin se concentre sur une approche proactive, surtout pour les races à risque élevé. Comprendre les facteurs de risque, en particulier pour le glaucome primaire, est crucial. Les propriétaires de races prédisposées devraient être informés de la nécessité de surveiller étroitement la santé oculaire de leur animal. Des examens ophtalmologiques réguliers sont recommandés pour ces chiens, afin de détecter tout signe précoce de la maladie. En outre, une sensibilisation accrue est nécessaire dans la communauté des éleveurs. Ceux-ci devraient être encouragés à éviter la reproduction de chiens ayant des antécédents de glaucome, réduisant ainsi le risque de transmission héréditaire de la maladie. La prévention du glaucome secondaire implique la gestion adéquate des conditions sous-jacentes pouvant conduire à cette affection. Cela inclut le traitement rapide et efficace des maladies oculaires telles que les cataractes ou les uvéites, ainsi que la prise en charge des traumatismes oculaires.
Pronostic:
Le pronostic du glaucome canin dépend largement de la rapidité du diagnostic et de la mise en œuvre du traitement. Dans les cas où le glaucome est détecté et traité rapidement, les chances de préserver la vision et de maintenir une qualité de vie acceptable pour l'animal sont nettement meilleures. Cependant, le glaucome est une maladie progressive et, dans de nombreux cas, même avec un traitement optimal, la perte de vision peut être inévitable. Le suivi régulier est essentiel pour évaluer l'efficacité du traitement et ajuster les plans de gestion au besoin. Dans certains cas, malgré tous les efforts, des interventions chirurgicales, telles que l'énucléation, peuvent devenir nécessaires pour gérer la douleur et les complications associées au glaucome avancé.
Conclusion:
Pour conclure, le glaucome canin représente un défi majeur en médecine vétérinaire, nécessitant une vigilance constante et une intervention médicale experte. La clé du succès dans la gestion de cette maladie réside dans la détection précoce et le traitement prompt, soulignant l'importance d'une collaboration étroite entre les vétérinaires, les ophtalmologistes spécialisés et les propriétaires d'animaux. L'attention portée à l'évolution des symptômes et la réactivité face aux premiers signes de la maladie sont cruciales pour prévenir la détérioration de la vision et minimiser les souffrances de l'animal. De plus, l'adoption d'une approche proactive dans la surveillance de la santé oculaire, particulièrement pour les races prédisposées, joue un rôle prépondérant dans la prévention du glaucome. Dans ce contexte, la sensibilisation des propriétaires et des éleveurs quant à l'importance des examens réguliers et des stratégies de prévention est primordiale. Bien que le glaucome puisse souvent conduire à des complications sérieuses, y compris la perte de la vision, une gestion efficace et individualisée peut significativement améliorer la qualité de vie des chiens atteints.
Charles Vétérinaire
Vétérinaire à Montréal
514-444-5118
𝘤𝘩𝘢𝘳𝘭𝘦𝘴𝘷𝘦𝘵.𝘤𝘰𝘮